Le concubinage désigne généralement le fait qu’un homme et une femme vivent ensemble comme mari et femme sans avoir célébré leur mariage à l’église. Le concubinage regroupe un vaste ensemble de situations : cohabitation de type sexuel de personnes célibataires, les divorcés remariés, le fait qu’une chrétienne devienne la deuxième (ou la énième) épouse d’un homme déjà marié, etc. Si la fornication déjà est un péché grave, que doit-on dire de ceux qui se sont mis dans une situation durable aux yeux de tous et sans gêne, dans laquelle ils commettent régulièrement la fornication ?

Le cas des divorcés-remariés et de la polygamie ont déjà été abordés plus haut. Dans ces situations, et plus généralement lorsqu’il y a un empêchement au mariage catholique entre les concubins [1], il n’y a pas d’autre régularisation chrétienne possible que la séparation, avec l’obligation de s’occuper des enfants nés de telles unions. Quand cela n’est pas (encore) possible pour des motifs graves, les cohabitants doivent au moins vivre en frères et sœurs, c'est-à-dire dans l’abstinence, en attendant la régularisation.

Le cas le plus usuel de concubinage est celui des jeunes qui s’établissent ensemble pour diverses raisons. Le plus souvent, ils ont commencé à coucher ensemble, puis à passer de plus en plus de temps ensemble chez l’un ou chez l’autre. Progressivement le déménagement intervient pour éviter les va-et-vient ou pour économiser en payant un seul loyer au lieu de deux, ou encore pour cesser d’entendre les reproches faits par les parents. Chez d’autres, c’est à la suite d’une grossesse. Là, les facteurs culturels et sociaux contraignent plus ou moins l’homme à prendre la femme chez lui. Certains encore commencent la cohabitation après la célébration d’un mariage coutumier, civil, musulman ou protestant (quand l’un d’eux n’est pas catholique). Untel ou unetelle veut tester la vie à deux avant de s’engager comme si une personne humaine était une marchandise que l’on peut essayer avant de prendre ou de laisser. Il y a aussi des jeunes filles compatissantes qui vont aider des veufs à prendre soin de leurs enfants en bas âge et qui finissent par prendre soin du veuf lui-même tout en logeant chez lui.

« Le cas de catholiques qui, pour des motifs idéologiques ou pour des raisons pratiques, préfèrent contracter un mariage civil, [coutumier, ou un mariage selon les rites d’une autre religion] refusant ou repoussant à plus tard la célébration du mariage religieux [catholique], devient de plus en plus fréquent. On ne peut considérer que leur situation soit semblable à celle de ceux qui vivent ensemble sans aucun lien, car il y a au moins un certain engagement dans un état de vie précis et probablement stable, même si, souvent, la perspective d'un éventuel divorce n'est pas étrangère à cette décision. Malgré cela, l'Église ne peut pas non plus accepter cette situation » [2].

Cela est dû au fait que « la sexualité n'est pas quelque chose de purement biologique, mais a plutôt rapport avec le centre intime de la personne. L'usage de la sexualité comme donation physique de soi atteint sa vérité et sa pleine signification quand elle exprime la donation personnelle de l'homme et de la femme jusqu'à la mort » [3], qui est manifeste dans le mariage chrétien mais absent dans le concubinage. Par suite, les concubins vivent publiquement dans le péché de fornication et sont appelés « pécheurs publics », « pécheurs graves manifestes ».

En fait, les autres formes de mariage ne reconnaissent pas toutes les propriétés essentielles du mariage catholique : l’unité et l’indissolubilité. L’unité exprime le fait que le mariage soit l’alliance conclue entre un homme et une femme qui s’engagent à vivre dans l’amour et la fidélité tout en reconnaissant l’égale dignité de l’homme et de la femme voulue par Dieu. Cela exclut entre autres les unions homosexuelles et la polygamie. L’indissolubilité est assimilable à l’absence de divorce.

Le mariage civil est très utile et recommandé parce qu’il protège la famille sur le plan civil et confère certains droits dans l’administration. Cependant, dans le Code des personnes et de la famille burkinabè (1989), « la polygamie est admise dans certaines conditions » (article 232). De plus, « le divorce peut résulter du consentement mutuel des époux constaté par le tribunal civil ou d'une décision judiciaire prononçant la dissolution du mariage à la demande de l'un des époux » (article 354) [4].

Quand l’un des fiancés n’est pas catholique, le mariage suivant les rites de sa religion est légitime afin de permettre à la partie non catholique de bien vivre sa foi. Cependant, il existe un très grand nombre d’églises et de sectes protestantes qui n’ont pas la même conception du mariage [5]. En cas de difficulté, il suffit en général de changer de communauté pour obtenir la bénédiction d’une nouvelle union à la suite d’un divorce. D’ailleurs, c’est un fait bien connu que certains pasteurs incitent leurs fidèles à se séparer de leur mari ou de leur femme quand ce dernier refuse de se convertir [6]. Les mariages coutumier et musulman admettent le divorce et la polygamie, et l’égale dignité de l’homme et de la femme dans le foyer n'est pas la chose la mieux partagée.

« C'est un devoir fondamental pour l'Église d'affirmer encore et avec force la doctrine de l'indissolubilité du mariage : à ceux qui, de nos jours, pensent qu'il est difficile, voire impossible, de se lier à quelqu'un pour la vie, à ceux encore qui sont entraînés par une culture qui refuse l'indissolubilité du mariage et qui méprise même ouvertement l'engagement des époux à la fidélité, il faut redire l'annonce joyeuse du caractère définitif de cet amour conjugal, qui trouve en Jésus-Christ son fondement et sa force » [7].

Le concubinage est bien déplorable sur le plan de la foi et compromet même le mariage. Le risque de se séparer est plus grand chez les couples vivant en concubinage que chez les couples mariés. De plus, à durée de vie commune identique, les couples mariés ont généralement moins de problèmes que les couples vivant en concubinage. La raison est toute simple : dans le concubinage, chaque partenaire a conscience que du jour au lendemain, il peut y avoir séparation. Cette inquiétude permanente, plus accentuée chez la femme, est à l'origine de nombreuses méfiances et réserves qui favorisent les disputes et les mésententes qui s'accumulent au fil du temps. Dans de telles conditions, les concubins ne sont pas rassurés à demander le sacrement de mariage, même lorsqu'ils ont conscience qu'ils sont à porte-à-faux avec Dieu et son Église.

Cependant, on ne peut pas obliger quelqu’un à se marier, fût-il en concubinage, car le mariage exige un engagement en toute liberté devant Dieu et les hommes à aimer fidèlement son conjoint jusqu’à ce que la mort intervienne. On peut seulement selon les cas encourager au mariage en expliquant clairement et avec charité les bienfaits de ce sacrement, inciter à l’abstinence en attendant la régularisation, ou bien exhorter à la séparation quand les deux n’envisagent pas de se marier, selon la recommandation de l’Apôtre : « Nous vous y engageons, frères, reprenez les désordonnés, encouragez les craintifs, soutenez les faibles, ayez de la patience envers tous » (1 Th 5, 14).

L’Église catholique n’exige pas un mariage pompeux mais seulement la célébration du sacrement de mariage. Rester en situation de péché grave et public par manque d’argent pour organiser un grand mariage procède plutôt de l’orgueil et de l’insouciance vis-à-vis de Dieu. Parfois, il s'agit d'un manque de confiance à la Providence divine, puisque Dieu peut nous aider dans tout ce que nous entreprenons : c'est à Cana que Jésus a accompli son premier signe sur l'intercession de la Vierge Marie, pour que la fête des noces soit belle. Mais très souvent, l'argument financier est un faux problème, une raison toute faite qui cache en réalité la peur de prendre ses responsabilités devant Dieu et devant les hommes.

Par ailleurs, le concubinage selon le langage juridique de l’Église (droit canon), désigne une union stable entre un homme et une femme qui comprend des relations sexuelles sans qu’il n’y ait mariage. Ainsi, contrairement à la conception commune, la cohabitation n’est pas une condition nécessaire pour qu’il y ait concubinage : une relation sexuelle régulière, établie sur une entente au moins implicite suffit, qu’il y ait cohabitation ou pas. Ainsi, les « deuxièmes bureaux », les maîtresses, les relations copains-copines qui ne sont pas chastes sont tous des cas de concubinage [8], alors que le Seigneur insiste pour « que le mariage soit honoré de tous et le lit nuptial sans souillure, car Dieu jugera fornicateurs et adultères » (He 13, 4).

 

Notes : 

[1] Il existe des empêchements au mariage tel que l’existence d’un lien antérieur, la réception du sacrement de l’ordre, la profession de vœu perpétuel de chasteté dans un Institut religieux, le rapt ou la détention forcée, le crime de conjugicide, la consanguinité, l’affinité ou parenté par alliance, etc. Cf. canons 1083-1123 et Jacob YODA, Ce qu’il faut savoir sur le mariage chrétien chez les catholiques, pp. 10-19.

[2] Jean-Paul II, Familiaris consortio, n°82.

[3] Conseil pontifical pour la famille, Vérité et signification de la sexualité humaine : des orientations pour l'éducation en famille, n°3.

[4] « Le divorce par consentement mutuel peut avoir lieu sur demande conjointe des époux ou par suite d'un accord postérieur constaté devant le juge au contentieux. Lorsque les époux demandent ensemble le divorce, ils n'ont pas à en faire connaître les motifs ; ils doivent seulement soumettre à l'approbation du juge un projet de convention qui en règle les conséquences » (article 355).

[5] Pour une étude sur le mariage protestant, voir : Roger OUEDRAOGO, Mariages dispars : propositions canoniques et pastorales pour une législation particulière au Burkina Faso, Otawa 2011, Université Saint-Paul, pp. 36-40.

[6] La raison serait biblique : « Ne formez pas d'attelage disparate avec des infidèles. Quel rapport en effet entre la justice et l'impiété ? Quelle union entre la lumière et les ténèbres ? Quelle entente entre le Christ et Béliar ? Quelle association entre le fidèle et l'infidèle ? » (2 Co 6, 14-15). Ce passage, lu dans son contexte invite plutôt à ne pas être complice des malfaisants dans le mal qu’ils commettent. Pourtant sur le mariage avec disparité de culte, l’enseignement est clair : « si un frère a une femme non croyante qui consente à cohabiter avec lui, qu'il ne la répudie pas. Une femme a-t-elle un mari non croyant qui consente à cohabiter avec elle, qu'elle ne répudie pas son mari. En effet le mari non croyant se trouve sanctifié par sa femme, et la femme non croyante se trouve sanctifiée par le mari croyant. Car autrement, vos enfants seraient impurs, alors qu'ils sont saints ! » (1 Co 7, 12-14)

[7] Jean-Paul II, Familiaris consortio, n°20.

[8] Cf. Jacob YODA, Ce qu’il faut savoir sur le mariage chrétien chez les catholiques, p. 7.

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